Une langue sexiste ?
La langue structure notre vision du monde. Elle reflète et produit une culture. La langue agit sur la formation de nos idées, de nos perceptions et de nos comportements.
Vous n'êtes pas convaincu-e ? Répondez à la devinette suivante :
Un père et sa fille sont victimes d'un accident de voiture. On les transporte d'urgence à l'hôpital. Le père meurt dans l'ambulance. La fille est dans un état critique, il faut lui faire une intervention chirurgicale. En voyant la patiente, le médecin qui devait faire l'opération s'écrie : "C'est ma fille !". Comment cela est-il possible ?
Le fait que le majorité des gens interrogés ne trouvent pas immédiatement la réponse montre que le genre masculin indiqué par l'article "le" devant le mot "médecin" renvoie bien à une personne de sexe masculin dans l'opinion commune et pas à l'Homme aux sens d'être humain. C'est ce petit article qui empêche de penser à une femme alors qu'actuellement la profession médicale est amplement féminisée, le nombre d'étudiantes en médecine dépassant même le nombre d'étudiants.
Neutralité de la langue
La langue française n'est donc pas neutre. Dans les faits, la langue valorise le masculin en lui donnant une dimension universelle comme dans l'expression "les Droits de l'homme" (au Québec, on préfère "les Droits de la personne") et elle discrimine les femmes en les invisibilisant (absence de féminin de noms de professions valorisées) ou en portant atteinte ) leur dignité (certains mots prennent au féminin une connotation péjorative : un gars/une garce, un entraîneur/une entraîneuse...).
Toutes les langues ne marquent pas nécessairement le genre comme le fait le français. Les langues iroquoises par exemple ont un féminin universel. Cependant, la langue n'est pas immuable. Certaines Suédois n'ont jamais entendu le mot "hen" et pourtant il pourrait bientôt entrer dans le langage courant. En plus des pronoms "elle" et "il", le pronom neutre "hen" pourrait en effet s'imposer. Il permettrait de désigner une personne sans faire référence à son sexe. Une évolution grammaticale pensée pour diffuser un peu plus l'idée de parité dans la société suédoise. Les personnes transgenres pourront également être désignées ainsi.